Ce matin, j'ai remis cette lettre à mon directeur.
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Cher *****,
Je me permets de t’écrire ceci en réaction à notre rencontre de l’autre jour parce que je m’exprime toujours mieux par écrit et que je tiens à réagir à certaines choses qui ont été dites.
Tout d’abord, pour ce qui est du niveau de bruit dans ma classe. Il est vrai que le groupe que j’ai cette année est très bavard et agité. Je maintiens ce que je t’ai déjà dit, je vois une belle amélioration dans leur comportement, mais on a encore des mauvaises journées. C’est parfois un combat de chaque instant. Je continue à multiplier les efforts pour les amener à être plus calmes et plus tranquilles. Ce n'est pas une mince affaire et plusieurs enseignantes, dont ***** et *****, m'ont confirmé qu'il s'agissait d'une cohorte difficile à cet égard.
Cela étant dit, j’aimerais insister sur deux choses. Premièrement, il y a le fait que dans ma classe, j’encourage les élèves à être actifs, allumés et à prendre part à ce qui se passe. J’aime quand c’est animé, quand ça bouge, quand c’est dynamique. L’atmosphère monastique de la classe traditionnelle dans laquelle les élèves passent leurs grandes journées à noircir des pages de cahiers ne m’intéresse pas. C'est celle que j'ai connue dans ma jeunesse et c'est ce que je m'emploie à ne pas reproduire. Bref, il y aura toujours un certain bruit chez nous. Deuxièmement, je travaille à éviter les débordements et à contrôler le niveau de bruit, mais il me semble que certaines collègues pourraient faire preuve d’un peu de tolérance à cet égard. Le dernier vendredi avant le congé des fêtes, j’étais en train d’ouvrir mes cadeaux et de rigoler avec les élèves quand ma voisine est venue me demander de faire moins de bruit parce que ses élèves étaient en dictée. En DICTÉE! Le dernier jour avant le congé! Tout de même!
Pour ce qui est des notes trop basses, je prends note et je vais agir en conséquence. Il est tout à fait possible que je sois trop exigeant par déformation professionnelle, comme tu le dis. Je suis toujours ouvert à me remettre en question. Je vais regarder de plus près ce que fait ***** et je vais m’ajuster.
Tu m’as demandé si j’utilisais le code de correction commun élaboré pour l’école. La réponse est oui, mais pas tout le temps et je tiens à t’expliquer pourquoi. Mes élèves sont en situation d’écriture à TOUS les jours (sauf le Jour 5). Ma priorité est de leur transmettre l’amour de l’écriture et l’envie de s’exprimer avec la langue écrite (et d’après ce que me disent les parents, c’est un succès). Comme ils sont constamment en train d’écrire, il n’est absolument pas réaliste que j’exige systématiquement que chaque phrase qu’ils composent soit décortiquée et analysée. J’ai du mal à imaginer une façon plus efficace de leur enlever complètement le goût d'écrire le moindre mot. Dans le cadre de mon journal de classe, il faut que je sois réaliste. Toutefois, dans des contextes spécifiques et pendant des leçons de grammaire, bien sûr que je vais utiliser le code de correction. J’ignore qui a bien pu te dire que je ne m’en occupais jamais, ni sur quoi cette personne se base pour passer ce jugement, mais il est faux.
Tu m’as également demandé si j’enseignais les stratégies de lecture explicite. Encore une fois, la réponse est oui, mais pour être parfaitement honnête avec toi, je l’enseigne lorsque c’est pertinent, je ne suis pas là-dedans constamment. Encore une fois, mon objectif est de donner le goût de lire aux élèves et les parents me disent une fois de plus que c’est un franc succès. Malheureusement, les commentaires que j’ai entendus des parents satisfaits et parfois même emballés ne se rendent pas jusqu’à toi. Tout ce que tu entends sur mon sujet semble venir de la bouche de collègues qui, de toute évidence, ne m’apprécient pas du tout et ne voient rien de bon dans ce que je fais.
Comme tu le sais, je suis très conscient que le travail d’équipe n’est pas une de mes forces, mais j’ai fait des efforts considérables cette année et je ne vois sincèrement pas ce que l’on pourrait me reprocher à cet égard. J’ai participé activement à toutes les réunions de cycle, j’ai fait ma part en m’occupant de la réservation des autobus pour la sortie au musée *****, je n’ai jamais dit non aux initiatives de mes collègues (bien que plusieurs des miennes aient été rejetées), j’ai mis de l’avant l’idée d’acheter des séries de romans pour travailler le français (méthode que j’utilise depuis des années), j’ai invité mes collègues à participer aux sorties à la bibliothèque municipale, je les ai invitées à participer au journal (offre qui a été accueillie avec scepticisme et froideur, sauf par ***** et *****), j'ai été présent à toutes les réunions syndicales sauf une, j'ai souvent consulté ***** à propos de divers sujets tels que l'évaluation ou la discipline. Lorsque ***** m'a demandé de changer l'horaire, j'ai accepté sans hésiter et d'ailleurs, je ne me souviens pas avoir jamais dit non à qui que ce soit. Lorsque l’instigateur du projet ***** m’a offert de venir me visiter gratuitement pour animer une activité, j’ai insisté pour qu’il offre également l'activité à mes collègues. Bref, il me semble avoir bien agi avec mes collègues et crois-moi, rien de tout ceci ne me vient naturellement ou instinctivement et je suis plutôt fier d’avoir toujours (à ma connaissance) inclus mes collègues à chaque occasion qui s’est présentée, sans toutefois tenter d’imposer mes façons de faire. Je ne vois pas très bien ce que j’aurais pu faire de plus. Si quelque chose m’échappe, je te prie d’éclairer ma lanterne.
Finalement, bien que j’apprécie beaucoup ta transparence et ton approche respectueuse et honnête, certaines de tes remarques me laissent profondément perplexe. Lorsque tu me dis que mon embauche ne faisait pas l’unanimité et que tu as mis la tête sur le billot pour moi (et je t’en suis éternellement reconnaissant), je ne peux m’empêcher de me demander si tu n’es pas en train de me dire que tu commences à le regretter et surtout, qu’est-ce qui aurait bien pu causer de tels regrets en si peu de temps!
Je ne suis pas parfait et j’en suis pleinement conscient. J’ai mes faiblesses et mes défauts, mais je suis ouvert à la critique et je suis toujours intéressé à approfondir ma réflexion, à remettre mes pratiques en question et à m’améliorer. Cela étant dit, je ne crois pas avoir fait du mauvais travail ces derniers mois. Les élèves sont motivés et font du bon travail. La matière est vue à un bon rythme et je suis confiant que tout le monde sera prêt à temps pour les examens ministériels. La plupart des parents me disent être ravis, les enfants sont heureux d’être là et, comme je le disais plus tôt, découvrent le plaisir d’écrire et de lire, je travaille très fort avec les élèves en difficulté et j’y consacre beaucoup de temps et d'effort. Franchement, il me semblait faire du bon travail et je suis très attristé de constater qu’aucun commentaire positif ne se soit rendu jusqu’à toi et que seuls des critiques et des plaintes aient été reçues. Cela étant dit, je te remercie à l’avance de me faire parvenir les commentaires de certaines de mes collègues qui ne semblent pas posséder l’amabilité de m’en faire part elles-mêmes.
C’est évidemment avec beaucoup de déception que je constate qu’après un si court laps de temps, j’ai déjà acquis l’antipathie de certaines de mes collègues avec qui je croyais bien m’entendre. Je suis également attristé que tu sembles remettre en question mon embauche. J’aurais beaucoup aimé que tu me voies comme une bonne prise, comme un atout et comme un prof efficace et compétent. Jusqu'à maintenant, j'étais emballé avec cette école et particulièrement impressionné par les ***** et par l'importance accordée aux arts. Mes collègues m'avaient semblé sympathiques, aimables, tolérantes et ouvertes, comme quoi il ne faut jamais se fier aux apparences. Je pensais bien avoir trouvé le milieu idéal pour les prochaines années.
Mais ne crains rien, la dernière chose que je veux, c’est travailler avec des gens qui m’ont pris en grippe ou causer des frictions dans ton personnel. De plus, l’idée d’enseigner la deuxième année ne m’emballe pas du tout, je quitterai donc l’école à la fin de cette année scolaire, comme tu semblais le suggérer. Ce sera mieux ainsi pour tout le monde, j’imagine.
Je t’écris ceci sans la moindre rancune et en espérant que les six prochains mois seront aussi harmonieux que possible. Je demeure entièrement ouvert à tous tes commentaires et à toutes tes suggestions. Tu es également le bienvenu dans ma classe n’importe quand, si tu as envie de venir voir ce qui s’y vit de l’intérieur. Tu seras fait membre honoraire du groupe 401.
Merci encore pour ta transparence et ta candeur,
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Cher *****,
Je me permets de t’écrire ceci en réaction à notre rencontre de l’autre jour parce que je m’exprime toujours mieux par écrit et que je tiens à réagir à certaines choses qui ont été dites.
Tout d’abord, pour ce qui est du niveau de bruit dans ma classe. Il est vrai que le groupe que j’ai cette année est très bavard et agité. Je maintiens ce que je t’ai déjà dit, je vois une belle amélioration dans leur comportement, mais on a encore des mauvaises journées. C’est parfois un combat de chaque instant. Je continue à multiplier les efforts pour les amener à être plus calmes et plus tranquilles. Ce n'est pas une mince affaire et plusieurs enseignantes, dont ***** et *****, m'ont confirmé qu'il s'agissait d'une cohorte difficile à cet égard.
Cela étant dit, j’aimerais insister sur deux choses. Premièrement, il y a le fait que dans ma classe, j’encourage les élèves à être actifs, allumés et à prendre part à ce qui se passe. J’aime quand c’est animé, quand ça bouge, quand c’est dynamique. L’atmosphère monastique de la classe traditionnelle dans laquelle les élèves passent leurs grandes journées à noircir des pages de cahiers ne m’intéresse pas. C'est celle que j'ai connue dans ma jeunesse et c'est ce que je m'emploie à ne pas reproduire. Bref, il y aura toujours un certain bruit chez nous. Deuxièmement, je travaille à éviter les débordements et à contrôler le niveau de bruit, mais il me semble que certaines collègues pourraient faire preuve d’un peu de tolérance à cet égard. Le dernier vendredi avant le congé des fêtes, j’étais en train d’ouvrir mes cadeaux et de rigoler avec les élèves quand ma voisine est venue me demander de faire moins de bruit parce que ses élèves étaient en dictée. En DICTÉE! Le dernier jour avant le congé! Tout de même!
Pour ce qui est des notes trop basses, je prends note et je vais agir en conséquence. Il est tout à fait possible que je sois trop exigeant par déformation professionnelle, comme tu le dis. Je suis toujours ouvert à me remettre en question. Je vais regarder de plus près ce que fait ***** et je vais m’ajuster.
Tu m’as demandé si j’utilisais le code de correction commun élaboré pour l’école. La réponse est oui, mais pas tout le temps et je tiens à t’expliquer pourquoi. Mes élèves sont en situation d’écriture à TOUS les jours (sauf le Jour 5). Ma priorité est de leur transmettre l’amour de l’écriture et l’envie de s’exprimer avec la langue écrite (et d’après ce que me disent les parents, c’est un succès). Comme ils sont constamment en train d’écrire, il n’est absolument pas réaliste que j’exige systématiquement que chaque phrase qu’ils composent soit décortiquée et analysée. J’ai du mal à imaginer une façon plus efficace de leur enlever complètement le goût d'écrire le moindre mot. Dans le cadre de mon journal de classe, il faut que je sois réaliste. Toutefois, dans des contextes spécifiques et pendant des leçons de grammaire, bien sûr que je vais utiliser le code de correction. J’ignore qui a bien pu te dire que je ne m’en occupais jamais, ni sur quoi cette personne se base pour passer ce jugement, mais il est faux.
Tu m’as également demandé si j’enseignais les stratégies de lecture explicite. Encore une fois, la réponse est oui, mais pour être parfaitement honnête avec toi, je l’enseigne lorsque c’est pertinent, je ne suis pas là-dedans constamment. Encore une fois, mon objectif est de donner le goût de lire aux élèves et les parents me disent une fois de plus que c’est un franc succès. Malheureusement, les commentaires que j’ai entendus des parents satisfaits et parfois même emballés ne se rendent pas jusqu’à toi. Tout ce que tu entends sur mon sujet semble venir de la bouche de collègues qui, de toute évidence, ne m’apprécient pas du tout et ne voient rien de bon dans ce que je fais.
Comme tu le sais, je suis très conscient que le travail d’équipe n’est pas une de mes forces, mais j’ai fait des efforts considérables cette année et je ne vois sincèrement pas ce que l’on pourrait me reprocher à cet égard. J’ai participé activement à toutes les réunions de cycle, j’ai fait ma part en m’occupant de la réservation des autobus pour la sortie au musée *****, je n’ai jamais dit non aux initiatives de mes collègues (bien que plusieurs des miennes aient été rejetées), j’ai mis de l’avant l’idée d’acheter des séries de romans pour travailler le français (méthode que j’utilise depuis des années), j’ai invité mes collègues à participer aux sorties à la bibliothèque municipale, je les ai invitées à participer au journal (offre qui a été accueillie avec scepticisme et froideur, sauf par ***** et *****), j'ai été présent à toutes les réunions syndicales sauf une, j'ai souvent consulté ***** à propos de divers sujets tels que l'évaluation ou la discipline. Lorsque ***** m'a demandé de changer l'horaire, j'ai accepté sans hésiter et d'ailleurs, je ne me souviens pas avoir jamais dit non à qui que ce soit. Lorsque l’instigateur du projet ***** m’a offert de venir me visiter gratuitement pour animer une activité, j’ai insisté pour qu’il offre également l'activité à mes collègues. Bref, il me semble avoir bien agi avec mes collègues et crois-moi, rien de tout ceci ne me vient naturellement ou instinctivement et je suis plutôt fier d’avoir toujours (à ma connaissance) inclus mes collègues à chaque occasion qui s’est présentée, sans toutefois tenter d’imposer mes façons de faire. Je ne vois pas très bien ce que j’aurais pu faire de plus. Si quelque chose m’échappe, je te prie d’éclairer ma lanterne.
Finalement, bien que j’apprécie beaucoup ta transparence et ton approche respectueuse et honnête, certaines de tes remarques me laissent profondément perplexe. Lorsque tu me dis que mon embauche ne faisait pas l’unanimité et que tu as mis la tête sur le billot pour moi (et je t’en suis éternellement reconnaissant), je ne peux m’empêcher de me demander si tu n’es pas en train de me dire que tu commences à le regretter et surtout, qu’est-ce qui aurait bien pu causer de tels regrets en si peu de temps!
Je ne suis pas parfait et j’en suis pleinement conscient. J’ai mes faiblesses et mes défauts, mais je suis ouvert à la critique et je suis toujours intéressé à approfondir ma réflexion, à remettre mes pratiques en question et à m’améliorer. Cela étant dit, je ne crois pas avoir fait du mauvais travail ces derniers mois. Les élèves sont motivés et font du bon travail. La matière est vue à un bon rythme et je suis confiant que tout le monde sera prêt à temps pour les examens ministériels. La plupart des parents me disent être ravis, les enfants sont heureux d’être là et, comme je le disais plus tôt, découvrent le plaisir d’écrire et de lire, je travaille très fort avec les élèves en difficulté et j’y consacre beaucoup de temps et d'effort. Franchement, il me semblait faire du bon travail et je suis très attristé de constater qu’aucun commentaire positif ne se soit rendu jusqu’à toi et que seuls des critiques et des plaintes aient été reçues. Cela étant dit, je te remercie à l’avance de me faire parvenir les commentaires de certaines de mes collègues qui ne semblent pas posséder l’amabilité de m’en faire part elles-mêmes.
C’est évidemment avec beaucoup de déception que je constate qu’après un si court laps de temps, j’ai déjà acquis l’antipathie de certaines de mes collègues avec qui je croyais bien m’entendre. Je suis également attristé que tu sembles remettre en question mon embauche. J’aurais beaucoup aimé que tu me voies comme une bonne prise, comme un atout et comme un prof efficace et compétent. Jusqu'à maintenant, j'étais emballé avec cette école et particulièrement impressionné par les ***** et par l'importance accordée aux arts. Mes collègues m'avaient semblé sympathiques, aimables, tolérantes et ouvertes, comme quoi il ne faut jamais se fier aux apparences. Je pensais bien avoir trouvé le milieu idéal pour les prochaines années.
Mais ne crains rien, la dernière chose que je veux, c’est travailler avec des gens qui m’ont pris en grippe ou causer des frictions dans ton personnel. De plus, l’idée d’enseigner la deuxième année ne m’emballe pas du tout, je quitterai donc l’école à la fin de cette année scolaire, comme tu semblais le suggérer. Ce sera mieux ainsi pour tout le monde, j’imagine.
Je t’écris ceci sans la moindre rancune et en espérant que les six prochains mois seront aussi harmonieux que possible. Je demeure entièrement ouvert à tous tes commentaires et à toutes tes suggestions. Tu es également le bienvenu dans ma classe n’importe quand, si tu as envie de venir voir ce qui s’y vit de l’intérieur. Tu seras fait membre honoraire du groupe 401.
Merci encore pour ta transparence et ta candeur,
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