Il me faudra décider si je reste à mon école actuelle ou si je m'exile ailleurs.
C'est particulièrement stressant parce que je ne sais toujours pas exactement ce que je veux faire.
En fait, c'est inexact, je sais quel est mon Plan A. Si je le peux, je vais essayer de prendre le poste de 6e année dans mon école de quartier. C'est l'école que fréquente déjà mon fils aîné et j'ai envie d'être présent dans son milieu. Il n'aime pas trop l'école et j'ai envie de faire une différence dans sa vie scolaire. J'espère pouvoir lui insuffler une bonne dose de motivation comme je le fais depuis des années avec les enfants des autres. Je suis également séduit à l'idée de ne plus utiliser l'auto et d'aller travailler à pied et à vélo. Non seulement je ferais ma part pour réduire mes émissions de GES, mais en plus, j'économiserais la galette! Ce serait 50 piastres de plus dans mes poches à chaque semaine, un montant qui ne ferait qu'augmenter avec les années! Bref, c'est une option vraiment intéressante.
Évidemment, ce n'est pas sans risque.
Scénario cauchemar: si des esti de bitches décident de s'en prendre à moi, je n'ai plus l'option de la fuite. Je vis ici, l'exil n'est plus une option. De plus, des attaques contre moi auraient des impacts sur mes enfants, ce qui est une idée carrément terrifiante. Il y a la perte d'anonymat aussi qui me fait chier. Je vais être reconnu partout: au supermarché, à la caisse, au bureau de poste, etc. Pour l'espèce d'ermite antisocial que je suis, ce n'est pas une perspective très alléchante.
Ma femme m'a avisé que si c'est ce que je choisis, je devrai déployer des efforts jusqu'à maintenant inégalés pour être accepté dans mon nouveau milieu. Elle m'a dit de me conformer à mon milieu de femmes, de jouer leur game, de me mêler plus au staff et de rejoindre une clique qui pourra prendre ma défense en cas de problème. Bref, elle me dit que je devrais me comporter comme une femme. Je ne suis pas entièrement convaincu que je serais capable de faire ça, ni même que ce serait souhaitable que je le fasse, mais bon. Elle soulève tout de même des bons points. Il me faudra vraiment faire des efforts pour être plus sociable. Ça ne sera pas facile.
Malgré cela, c'est tout de même vers cette option que je penche actuellement.
Évidemment, mon souhait d'obtenir ce poste a peu d'importance puisque, depuis mon changement de commission scolaire, j'ai perdu toute mon ancienneté. Donc, plutôt que d'être l'un des premiers à choisir comme c'était le cas avant, je me retrouve en queue de peloton. Je vais hériter des restes dont personne ne veut. Toutefois, cela ne signifie pas que je n'ai aucune chance. La 6e année n'a jamais été très attrayante pour la majorité des enseignantes de primaire et le retour des libéraux avec leurs fantasmes de cours d'anglais intensif fait fuir les gens encore plus. J'ai donc peut-être tout de même une chance.
Mais si quelqu'un prend le poste avant moi, je devrai me rabattre sur un plan B. Et là, je ne sais vraiment pas ce que je devrais faire. Aucune des options ne me semble hyper-alléchante.
D'un côté, deux écoles relativement proches de chez moi ont des ouvertures en 6e année (quand je vous dis que tout le monde fuit cette année-là, c'est un vrai stampede!) Mais je ne sais rien à propos de ces écoles et à part l'économie d'essence, je n'ai pas vraiment d'autres raisons d'y aller. Je ne suis pas plus fou que les autres, la 6e année n'a rien de bien attrayante ces temps-ci. Cette débilité de cours d'anglais intensif sent le désastre à mille lieux à la ronde.
L'autre option serait de rester là où je suis. Le directeur est d'ailleurs venu me voir à nouveau la semaine dernière pour réitérer que j'étais le bienvenu et qu'il avait l'intention d'équiper ma classe de nombreux ordinateurs. Le problème, c'est que je ne suis pas trop aimé du staff et ma taupe, ma seule véritable alliée, semble assez déterminée à partir. Mais si le poste qu'elle convoite est pris avant que vienne son tour, alors elle songe plutôt à rester. Si elle part, je me retrouve avec deux nouvelles collègues en 4e année que je ne connais pas du tout. Et le début de la 4e année ne m'emballe pas, je les trouve pas mal trop bébés...
Évidemment, si je reste, il y a d'excellentes chances que je puisse mettre sur pied une super activité parascolaire de bande dessinée. Ce serait vraiment cool de triper à faire des BD avec une gang de jeunes motivés! Mais encore là, il y a un autre côté de la médaille: au moins une heure de travail de plus par semaine non-rémunérée et seulement partiellement compensée par des libérations de surveillance. Quand je dis une heure, je parle du temps passé avec les enfants. S'ajoutent à ça les planif, les corrections, etc. Ça me tente quand même, mais ça me semble contradictoire par rapport à mon désir de passer plus de temps avec mes enfants.
Alors je nage en pleine incertitude et je ne sais pas quoi faire. J'ignore tout de ce qui m'attend demain. C'est excitant et stressant à la fois.