Au Québec, critiquer les garderies, ça ne se fait pas. C'est un énorme tabou.
Les garderies sont vues comme un phénomène entièrement positif et merveilleux, une véritable bénédiction. Un outil de la libération de la femme qui peut ENFIN aller se faire chier dans une carrière plutôt que d'être réduite à l'ignoble esclavage que représenterait l'éducation de ses propres enfants.
Malheureusement, les effets néfastes ne sont pas inexistants. Loin de là.
De mon point de vue de prof qui travaille dans le milieu de l'éducation depuis plus de 20 ans, l'effet le plus tragique que je constate, c'est le désinvestissement des parents.
Comme ils confient leurs enfants à des étrangers dès leur plus jeune âge, on dirait qu'ils en viennent à penser que l'éducation n'est plus leur responsabilité. C'est la job de la garderie et, plus tard, de l'école. Le gouvernement va s'en occuper, alors ils s'impliquent de moins en moins.
Autre effet pervers, les parents passent de moins en moins de temps avec leurs enfants. Ils ont mieux à faire. Lorsque je vais jouer au parc avec mes flos, je suis toujours sidéré de voir que les autres parents (les rares qui sont là) sont beaucoup plus préoccupés par leur esti de téléphone cellulaire que par les exploits de leurs mousses. C'est comme si cette distance imposée presque immédiatement après la naissance avait pour effet de réduire l'intensité de l'attachement parental.
De temps en temps, dans les journaux, on en entrevoit les conséquences, bien que personne n'ose parler de la cause.
En voici un rare exemple:
Faible diplomation: Proulx met en cause le «décrochage parental»
Le faible taux de diplomation au Québec s'explique en partie par le « décrochage parental » chez les francophones, soutient le ministre de l'Éducation, Sébastien Proulx.
(...) « Une des clés » pour augmenter le taux de diplomation, « c'est l'implication des gens, a-t-il expliqué lors d'une mêlée de presse. Au Québec, il faut se rappeler que, du côté francophone, il y a historiquement, oui, un décrochage scolaire, mais il y a aussi un dérochage parental. Il y a un décrochage de l'école. Il n'y a même pas suffisamment de valorisation. Alors il faut se regarder dans les yeux pour les bonnes raisons comme société. »
Pour une fois, M. Proulx a raison.
Même s'il n'a pas l'air de pousser sa réflexion plus loin pour se demander quelle est la véritable cause de ce décrochage parental.
Olivia du blogue JusteSix a pondu un texte intéressant sur le sujet, en voici quelques extraits:
Il y a trop de « BYE » dans la vie de nos enfants
Ç’a commencé avec les CPE: on a demandé de plus en plus à l’état, par l’entremise de ses éducatrices, de faire ce que nous avions considéré jusqu’alors être la responsabilité du parent (donner le biberon, bercer, langer, donner de l’affection, introduire les aliments, aider à se retourner, ramper, marcher, apprendre à parler, à compter, soigner les bobos et les maladies…).
Ça s’est poursuivi avec l’école: puisque nous avions déjà accepté que nos enfants soient élevés par d’autres que nous durant leurs premières années de vie, petit à petit, nous avons étendu à l’école primaire cette idée que nos responsabilités pouvaient dorénavant être largement assumées par l’état. Alors en plus de l’enseignement des matières, on a demandé à l’école d’être responsable d’enseigner à nos enfants la politesse, à bien manger, à gérer les conflits, à pratiquer une activité physique, à s’aimer eux-mêmes, à partager, à écouter, à contrôler leurs humeurs… cette liste semble s’allonger sans arrêt.
(...) Lentement, la désensibilisation à nos propres enfants, à leurs besoins, à leurs signaux de détresse, à leurs difficultés et à nos responsabilités envers eux a fait son chemin. Et maintenant, quand quelque chose cloche, quand notre enfant développe une difficulté, s’il ne va pas bien, on pointe du doigt le système: c’est le système qui a failli à ses responsabilités, pas nous. On questionne les réseaux sociaux et l’univers virtuel, le manque d’investissements, le manque de volonté politique, la pénurie de spécialistes, les failles des programmes éducatifs… Tout, sauf les parents.
(...) On a désappris à sentir leur détresse et à y réagir. On ne connaît plus autant nos enfants, on est déconnecté d’eux. On leur a dit « BYE » tellement souvent, tous les matins de leur vie. Et on a développé le réflexe de chercher les causes de leurs difficultés, autant que les solutions à celles-ci, partout ailleurs qu’en nous-mêmes, les parents.
(...) C’est là qu’on en est rendu. L’état se charge des enfants, et les parents s’en déchargent. On ne sait plus trop être là pour la chair de notre chair, on ne sait plus les entendre, les regarder. On s’est délesté collectivement, et on nous incite à n’en ressentir aucune culpabilité. (...)
Ça me fait penser à ce que m'a déjà dit une de mes élèves, il y a quelques années de cela.
Je ne l'oublierai jamais.
Elle m'a dit: "Tu es le seul qui aime passer du temps avec moi, pas juste parce que t'es payé pour le faire."
Venant d'une p'tite cocotte de 12 ans, ça renverse, croyez-moi. Ça m'avait fendu le coeur.
Les garderies sont vues comme un phénomène entièrement positif et merveilleux, une véritable bénédiction. Un outil de la libération de la femme qui peut ENFIN aller se faire chier dans une carrière plutôt que d'être réduite à l'ignoble esclavage que représenterait l'éducation de ses propres enfants.
Malheureusement, les effets néfastes ne sont pas inexistants. Loin de là.
De mon point de vue de prof qui travaille dans le milieu de l'éducation depuis plus de 20 ans, l'effet le plus tragique que je constate, c'est le désinvestissement des parents.
Comme ils confient leurs enfants à des étrangers dès leur plus jeune âge, on dirait qu'ils en viennent à penser que l'éducation n'est plus leur responsabilité. C'est la job de la garderie et, plus tard, de l'école. Le gouvernement va s'en occuper, alors ils s'impliquent de moins en moins.
Autre effet pervers, les parents passent de moins en moins de temps avec leurs enfants. Ils ont mieux à faire. Lorsque je vais jouer au parc avec mes flos, je suis toujours sidéré de voir que les autres parents (les rares qui sont là) sont beaucoup plus préoccupés par leur esti de téléphone cellulaire que par les exploits de leurs mousses. C'est comme si cette distance imposée presque immédiatement après la naissance avait pour effet de réduire l'intensité de l'attachement parental.
De temps en temps, dans les journaux, on en entrevoit les conséquences, bien que personne n'ose parler de la cause.
En voici un rare exemple:
Faible diplomation: Proulx met en cause le «décrochage parental»
Le faible taux de diplomation au Québec s'explique en partie par le « décrochage parental » chez les francophones, soutient le ministre de l'Éducation, Sébastien Proulx.
(...) « Une des clés » pour augmenter le taux de diplomation, « c'est l'implication des gens, a-t-il expliqué lors d'une mêlée de presse. Au Québec, il faut se rappeler que, du côté francophone, il y a historiquement, oui, un décrochage scolaire, mais il y a aussi un dérochage parental. Il y a un décrochage de l'école. Il n'y a même pas suffisamment de valorisation. Alors il faut se regarder dans les yeux pour les bonnes raisons comme société. »
Pour une fois, M. Proulx a raison.
Même s'il n'a pas l'air de pousser sa réflexion plus loin pour se demander quelle est la véritable cause de ce décrochage parental.
Olivia du blogue JusteSix a pondu un texte intéressant sur le sujet, en voici quelques extraits:
Il y a trop de « BYE » dans la vie de nos enfants
Ça s’est poursuivi avec l’école: puisque nous avions déjà accepté que nos enfants soient élevés par d’autres que nous durant leurs premières années de vie, petit à petit, nous avons étendu à l’école primaire cette idée que nos responsabilités pouvaient dorénavant être largement assumées par l’état. Alors en plus de l’enseignement des matières, on a demandé à l’école d’être responsable d’enseigner à nos enfants la politesse, à bien manger, à gérer les conflits, à pratiquer une activité physique, à s’aimer eux-mêmes, à partager, à écouter, à contrôler leurs humeurs… cette liste semble s’allonger sans arrêt.
(...) Lentement, la désensibilisation à nos propres enfants, à leurs besoins, à leurs signaux de détresse, à leurs difficultés et à nos responsabilités envers eux a fait son chemin. Et maintenant, quand quelque chose cloche, quand notre enfant développe une difficulté, s’il ne va pas bien, on pointe du doigt le système: c’est le système qui a failli à ses responsabilités, pas nous. On questionne les réseaux sociaux et l’univers virtuel, le manque d’investissements, le manque de volonté politique, la pénurie de spécialistes, les failles des programmes éducatifs… Tout, sauf les parents.
(...) On a désappris à sentir leur détresse et à y réagir. On ne connaît plus autant nos enfants, on est déconnecté d’eux. On leur a dit « BYE » tellement souvent, tous les matins de leur vie. Et on a développé le réflexe de chercher les causes de leurs difficultés, autant que les solutions à celles-ci, partout ailleurs qu’en nous-mêmes, les parents.
(...) C’est là qu’on en est rendu. L’état se charge des enfants, et les parents s’en déchargent. On ne sait plus trop être là pour la chair de notre chair, on ne sait plus les entendre, les regarder. On s’est délesté collectivement, et on nous incite à n’en ressentir aucune culpabilité. (...)
Ça me fait penser à ce que m'a déjà dit une de mes élèves, il y a quelques années de cela.
Je ne l'oublierai jamais.
Elle m'a dit: "Tu es le seul qui aime passer du temps avec moi, pas juste parce que t'es payé pour le faire."
Venant d'une p'tite cocotte de 12 ans, ça renverse, croyez-moi. Ça m'avait fendu le coeur.